Philosophe, auteur et professeur au campus de Shippagan de l’Université de Moncton
Pour l’homme de conviction et de rigueur, l’équité, la justice sociale et le caractère durable du développement des nos sociétés font partie des enseignements du professeur de philosophie et de sociologie du campus de Shippagan de l’Université de Moncton. Né en septembre 1970, le philosophe et chercheur a grandi dans une famille d’enseignants de l’Outaouais (Québec) où les livres avaient une place de choix. Participant aux manifestations culturelles du Centre national des arts et des musées d’Ottawa, il s’est avéré tôt que la vie intellectuelle serait au centre de sa vie. Après avoir suivi des cours de journalisme au Collègue algonquin d’Ottawa et de littérature à l’Université de Montréal, il débarque à Paris à l’âge de 20 ans. En 1992, il était inscrit à l’Université de la Sorbonne. Il se dit d’ailleurs impressionné par le patrimoine bâti de la Ville Lumière. Ayant été étudiant au Collège international de philosophie de Paris, il s’inscrit aux études supérieures en 1997 à l’Université Paris-VIII d’où il obtient son doctorat en 2004. Ses travaux sur l’idéologie managériale et les souverainetés des pouvoirs privées et leurs impacts dans la société ont été fortement influencés par l’économiste français François-Xavier Verschave, militant pour les droits de la personne, dont la démarche s’apparente à celle du professeur et sociologue suisse Jean Zigler. Vivant humblement de revenus tirés des charges d’enseignement, de la participation à des travaux de recherche et d’honoraires de conférenciers, il est auteur de vingt essais, dont plus de quatorze ont été traduits en anglais, en espagnol, en italien et en arabe. La liste des prix et distinctions reconnaissant son œuvre est longue. Cette dernière souligne sa position de finaliste au Prix du gouverneur général du Canada, sa participation à des salons du livre à titre d’invité d’honneur au Québec et Suisse. Il faut également ajouter la reconnaissance des médias et sa participation à des documentaires qui soulignent sa contribution à construite un monde meilleur.
Il a signé plusieurs titres aux éditions Écosociété (Québec) sur les pratiques controversées d’instances privées et publiques participant à la mondialisation industrielle, au consumérisme et au capitalisme. Dans le cadre de son engagement au Collègue international de philosophie de Paris, et comme directeur de programme, l’intellectuel a fait paraître aux Éditions Lux (Montréal) six monographies théoriques sur la notion d’économie. Dans l’ouvrage L’économie de la nature (2019), l’auteur explore la science écologique, les liens entre les espèces, les écosystèmes et l’humain, la subordination de la nature à l’exploitation par l’homme, notamment par l’agriculture. Il présente des idées et des faits pour redonner un sens noble au mot économie, en le distinguant de l’intendance matérielle, de l’exploitation et du capitalisme.
Le militantisme a fait partie de la vie de l’étudiant et du jeune chercheur. Il relate sa participation à la croisade pan-canadienne d’une organisation altermondialiste en 1999, où il a livré des conférences à Vancouver, Régina, Winnipeg, et Halifax sur les enjeux et les impacts de la mondialisation et du libre-échange. En 2020, Il a été finaliste pour le Prix des libraires du Québec dans la catégorie essai pour le livre Bande de colons : Une mauvaise conscience de classe, Éditions Lux. Dans un ton polémiste, il propose ici une réflexion sur les impacts du colonialisme associé à l’exploitation des ressources naturelles. Il met en scène les colonisateurs ou les grandes entreprises oligarchiques, les colons, soit les travailleurs et enfin les colonisés, les peuples autochtones qui ont subi les affres de l’accaparement du territoire à des fins industrielles et affairistes. « Si cela était un héritage de la société industrielle et de la volonté de certains de dominer et de s’enrichir, l’exploration à grande échelle des ressources naturelles a causé la spoliation des peuples fondateurs, et conséquemment à l’érosion de leurs cultures… je peux certainement en témoigner après un participation à cinq commissions parlementaires sur les paradis fiscaux ». Toutefois, le vingtième et vingt-et-unième siècle au Canada ont vu émerger un grand nombre de politiques d’un état de droit. Mentionnons les droits prévus à la Charte canadienne des droits et libertés (1982), tels le droit d’association, le droit d’expression, le droit de vote, des politiques sur les salaires et l’amélioration des conditions de vie de la classe moyenne.
Pour l’auteur présent sur les scènes médiatiques du Canada et de l’Europe, le lien entre l’état de la planète et l’équité sociale envers les groupes autochtones et ceux qui occupent le territoire est une réalité qui est devenu trop tardivement un enjeu de gouvernance. L’État de planète déjà un constat du Rapport Meadows (Limites à la croissance) publié par le Club de Rome en 1972 énonce les conséquences économiques de la croissance économique, la limitation des ressources et l’évolution démographique. Ces constats qui sont maintenant au cœur des recherches qu’il effectue sur le développement durable des régions côtières de l’Est du Canada sont maintenant augmentés par les impacts des changements climatiques et l’extinction des espèces.
Décriant les inégalités sociales associées à l’accaparement des ressources, nourri par la mondialisation du commerce et la dominance des grandes sociétés oligarchiques, l’équilibre planétaire demeure préoccupant. Entre la fin du 19e siècle et 1992, la moitié des ressources énergétiques de la planète avaient été dépensées. Au surplus, le déséquilibre planétaire causé par les changements climatiques rend la vie des communautés rurales ou locales à risque. Mentionnons les épisodes d’inondations, de grandes crues, de feux de forêt, de verglas, de sécheresse, l’acidification des océans, la migration des espèces indésirables et l’érosion de la biodiversité.
En reconnaissant la perte d’équilibre entre production humaine et protection environnementale, avant l’effondrement de la biosphère, des structures naturelles et des institutions de notre temps, l’heure est venue non seulement de faire preuve de décroissance (consommer moins, dépenser moins, polluer moins), mais aussi de concevoir les activités de recherche et d’enseignement valorisant les sciences intéressées par l’éco-anxiété, l'étude du low-tech, la géopolitique des bio-régions, les gestions de crises environnementales, l’accueil des réfugiés environnementaux et l’aménagement du territoire.
Partageant la vision de Yves-Marie Abraham (Hautes Études commerciales, Montréal), une croissance non soutenable expliquée par les limites des écosystèmes et la disponibilité des ressources, milite en faveur de nouvelles organisations sociales et de gouvernance centrées sur les régions. « Je crois à la démocratie régionale », dit-il. « Cela signifie unir les forces, les ressources, les talents et les aspirations du peuple à l’échelle des régions et réinventer la gouvernance et la consommation ». Pour le visionnaire, « il faudra abandonner la dépendance à certaines formes d’énergie, miser sur les énergies locales et renouvelables, s’appuyer sur une alimentation à l’échelle des régions, organiser la production et la consommation en cycles courts, optimiser le cycle de vie des produits, recycler et valoriser les matières résiduelles ». Parmi les thèmes ici exposés et discutés dans le cadre du programme développement durable et zone côtière qu’il anime au campus de Shippagan, un questionnement s’impose sur la durabilité de certaines productions industrielles, il mentionne la production bleuet et de canneberge, l’extraction de la tourbe, la pêche au crabe et au homard… Nous pouvons sentir la fierté qu’il a de former les acteurs de la société de demain. « En offrant les contenus académiques en éthique, enjeux sociaux et contexte historique, je contribue à construire une vision pluraliste chez les étudiants ». Les solutions toute faite n’existent pas, il faudra créer des gouvernances régionales adaptées aux enjeux politiques, sociaux et environnement d’aujourd’hui.